Depuis le premier juin, la saison cyclonique a débuté pour Haïti et se terminera le 30 novembre. Les habitants de tout le Sud d’Haïti encore très affectés, par le passage du cyclone Matthew, en Octobre 2016, sont sur le qui-vive. Dans les sections communales, beaucoup d’entre eux vivent encore sous des tentes ou dans des abris de fortune qu’ils ont érigés après la catastrophe avec des débris de maisons. Ils n’en peuvent plus. A l’occasion du début de la saison cyclonique, ils ont décidé de lancer un cri d’alarme aux dirigeants haïtiens et au monde entier.
Alors que les arbres reverdissent petit à petit et que les herbes abondantes de cette terre tropicale cachent de plus en plus les ravages causés par le violent ouragan, il y a deux ans, l’on a tendance à oublier les êtres humains, ceux et celles qui ont vécu une expérience inimaginable, douloureuse. A rappeler que des gens, disposant de petites maisons de fortune, ont dû affronter des rafales de vents de plus de 250 kilomètres/heure accompagnés de pluie. Ils ont vu éteindre sous leurs yeux la vie d’être chers ; ils ont assisté impuissants au démantèlement de leurs habitats et à la destruction de leurs moyens de survie, etc..
Après la catastrophe, des organisations humanitaires ont aidé pour des réparations et pour la construction de quelques dizaines de maisons dans différentes communes. Ces initiatives louables ne représentent qu’une goutte d’eau dans la mer, car les besoins en matière de logements décents dans le grand Sud d’Haïti sont immenses. La plupart des initiatives ont été localisées dans les villes et agglomérations accessibles en véhicules. La grande majorité des sections communales qui se trouvent en montagnes difficiles d’accès, là où vivent les paysans et paysannes, ont été peu touchées.
L’ampleur des dégâts sur l’habitat dans le grand Sud est immense et ne peut reposer sur quelques actions d’ONG de bonne volonté. La situation requiert un grand programme de construction de logements décents, suffisamment résistants aux cyclones et séismes, car le Grand Sud d’Haïti est aussi traversé par des failles pouvant causer des tremblements de terre à n’importe quel moment. Il faut donc une implication directe des autorités publiques pour édicter les normes, élire et sécuriser les emplacements, contribuer aux financements, etc. En bref, il faut un plan de reconstruction et d’aménagement du grand Sud, qui tienne compte non seulement des villes, mais aussi des communautés des mornes trop souvent oubliées.
Malheureusement, l’Etat haïtien n’a pas pu, jusqu’ici, donner cette impulsion. L’annonce faite par le président de la République, lors du passage de sa « caravane dans le Sud », de la disponibilité de fonds pour construire quelques 2,000 logements dans la région n’a pas eu de suite. Les citoyens et citoyennes des sections communales de cette région dévastée n’acceptent pas cet abandon, cette mise au rancart dont ils sont victimes. Le premier juin 2018, début de la saison cyclonique, ils se sont mis debout pour rappeler qu’ils existent, qu’ils ont des droits. Ils ont crié pour exprimer leurs souffrances. Ils ont proposé la mise en place rapide de refuges pour la saison cyclonique, car dans leurs communautés tous les espaces collectifs qui servaient dans le temps d’abris lors des cyclones, ont été détruits. Ils ont réclamé de l’Etat la mise en place sur cinq ans, d’un vaste programme de construction d’au moins 100,000 logements. Qui entendra leurs cris ?