Hier, dimanche 23 Août 2020, la tempête tropicale Laura a frappé Haïti. De nombreux dégâts sont enregistrés. Au matin du 24 aout, l’on parle déjà d’un bilan provisoire de neuf morts, deux disparus, plusieurs jardins détruits et du bétail emporté, sans compter les maisons inondées. Le Sud-Est et l’Ouest semblent être les zones les plus touchées. Mais des dégâts sont signalés un peu partout sur le territoire d’Haiti qui devient de plus en plus vulnérable à la moindre averse.
Cette tempête est passée rapidement sur le pays. Sa trajectoire n’était pas très bien maitrisée: tantôt l’on parlait du nord, tantôt du Centre et finalement du Sud-Est et de l’Ouest. De nombreuses personnes n’étaient pas au courant de son arrivée et ont été surprises par sa présence.
A la capitale, plusieurs rues se sont transformées en lits de rivière et la furie des eaux ont emporté des véhicules, des motos et même des vies humaines. Il ne s’agit plus de craindre une rivière ou d’un ravin qui passe à côté de chez soi. Désormais, quel que soit l’endroit où l’on se trouve en Haïti, on peut être victime du déferlement des eaux de ruissellement qui ne peuvent pas trouver leur chemin après une pluie.
Le problème de l’absence de gouvernance, de l’indifférence des dirigeants et de l’insouciance des citoyens et citoyennes sont les premières causes de cette situation lamentable. Chaque année, le pays vit des catastrophes chaque fois plus meurtrières, mais la société tarde à se ressaisir et à accorder l’attention nécessaire à l’environnement.
Au cours des vingt(20) dernières années, de nombreux efforts ont été faits de la part des ONG, de la société civile et même de l’Etat pour mettre en place des structures de protection civile. On ne compte plus le nombre de séminaires réalisés, de comités mis en place, de matériels achetés et distribués, de systèmes de communication installés. Le problème se situe au niveau de leur articulation pour prévenir les catastrophes. Les mairies qui devraient jouer un rôle fondamental dans la gestion du territoire n’ont pas de moyens. On détruit des arbres, on construit n’importe où et les entités responsables ferment les yeux. Tout est concentré entre les mains du pouvoir central à Port-au-Prince qui consomme les ressources et qui décide de tout. Les structures sont là, mais n’arrivent pas à agir convenablement parce qu’au plus haut niveau, les orientations et les moyens ne sont pas mis à leur disposition pour une meilleure gestion du territoire.
Cette nouvelle catastrophe frappe le pays dans un contexte de crise politique aigue, avec un gouvernement décrié dont on attend la démission et qui n’arrive à résoudre aucun problème. Elle arrive dans un contexte de désarticulation profonde des institutions et des organisations qui ont peu de relations avec l’Etat alors que le soin de l’environnement requiert un consensus global et des agissements individuels qui vont tous dans le même sens. Elle arrive dans un contexte où la COVID-19 est encore présente dans le pays, même si le nombre de cas rapportés quotidiennement a beaucoup diminué et que toutes les activités, y compris le fonctionnement des écoles et autres lieux publics, ont repris.
Haïti est en plein cœur de la saison cyclonique. Laura est la première tempête qui a frappé véritablement le pays. Nous craignons l’arrivée d’autres cyclones, si l’on tient compte des prévisions pour l’année 2020. Espérons que le message donné par la première tempête de la saison sera entendue. Espérons que les haïtiens et haïtiennes prendront enfin leur destin en main et surtout qu’ils accorderont de l’intérêt pour l’environnement qui ne cesse de leur demander des comptes.
Colette Lespinasse, 24 aout 2020